Le cri, 1990

U-matic, PAL, couleur, son


Trois hommes, masqués, figés à l'arrière de la scène (peur de la contamination), assumant silencieux un rêve d'hygiène et de protection. Au milieu de ces témoins impassibles, une voiture écrasée, peut-être par le poids des années (Wolf Vostell en a trimballé de ces carcasses qui véhiculent la modernité, de ces cercueils trop grands). Une chorale d'hommes et de femmes, avec pour bouclier quelques aspirateurs. Et puis, le chef d'orchestre, le guide, le musicien et le visionnaire aimablement aidé d'un chien, le meilleur ami de l'homme. Un morceau à quatre pattes, X violons, cinq sopranos, quatre bûcherons, quatre cents spectateurs en attente de l'évènement Fluxus, des écrans qui ne se comptent plus et quelques trombones-hautbois. Loin du cynisme, le bruissement mélancolique du monde et des voix du ciel. La scène se partage, s'écarte, laisse la place, pour un instant reconductible à l'infini, à quelques passages, s'entame sur une symphonie de l'objet, de la réalité "en soi". Le cri est le grincement de la scie, la pénétration d'un souffle d'air, la friction d'une matière contre une autre, d'un corps contre son environnement, c'est le résultat d'un choc, d'un heurt paroxystique, l'aboutissement d'une recherche.


Stéphanie Moisdon