Biographie
Delphine Reist est née en 1970 à Sion en Suisse. Depuis son diplôme de l’école de l’école supérieure d’Arts Visuels de Genève en 1998, Delphine Reist expose de préférence dans des lieux non institutionnels, usines désaffectées, entrepôts ou parkings. Que ce soit pour ses performances ou installations, du matériel trouvé, banal et quotidien, se déploie le plus souvent dans son contexte, mais devient un élément perturbateur du lieu. L’objet utilisé est techniquement transformé pour pouvoir exprimer sa fonction sans la présence humaine. Dans la pièce Baril (2002), un bidon roule tout seul dans l’espace jusqu’à ce qu’un obstacle lui barre la route, et le force à changer de trajectoire. Ses sculptures mobiles animent des machines hors de l’intervention humaine, donnant vie et autonomie à la mécanique de notre quotidien. A chaque installation d’une œuvre, le lieu est occupé de façon spécifique, l’œuvre étant donc montrée de façon toujours renouvelée. Ainsi l’installation Caddies, met en scène des caddies, animés par un moteur, qui avancent inlassablement jusqu’à épuisement de leur batterie. Montrée à Stuttgart pour la première fois en 2003, ils roulent dans une flaque d’eau. Pour son exposition personnelle à la Nouvelle Galerie de Grenoble, ils s’entrechoquent et percutent les murs de la galerie, jusqu’à détruire un muret de parpaings. Et en 2008, pour son exposition monographique au festival Rayon Frais de Tours, ils tournent en rond exploitant l’immense superficie du parking, désaffecté pour l’occasion, de l’université de la ville. Que ce soit des voitures qui démarrent sans pour autant rouler ou des perceuses qui se déclenchent sans raison, ses objets quotidiens, animés d’une quête absurde, évoquent aussi bien le ready-made que les nouveaux réalistes mais renouvellent l’objet en art, en perturbant l’environnement de leurs mouvements autonomes, comme des êtres animés sans but, état de crise du monde matériel, voire du monde tout simplement.
Deux commandes publiques sont réalisées sous sa direction. Tout d’abord, en 1998, pour l’université de médecine de Grenoble, son travail s’inscrit traditionnellement de façon pérenne dans l’architecture avec des textes d’anciens traités de médecine, gravés sur des plaques de béton sur des murs du bâtiment. De 2008 à 2010, pour le nouveau Collège Sismondi à Genève, la proposition détourne les usages de la commande publique, préférant une occupation temporaire du chantier à trois moments de son évolution. Sous le titre de Manœuvres, le site de construction, ouvert en dehors des heures de travail, devient le lieu d’interventions éphémères, qui sont cependant documentées par un film. Le projet garde la cohérence de ses travaux précédents, son goût pour les locaux désaffectés, son questionnement des contraintes du lieu, son utilisation d’objets quotidiens, et aussi ses collaborations avec d’autres artistes comme Laurent Faulon, avec qui elle travaille sur des expositions et des projets de résidences, depuis 2001.
En marge de son travail d’artiste, elle intervient et enseigne dans différentes structures, notamment aux Beaux-Arts de Lyon de 2006 à 2008.
Patricia Maincent