Brilliant Noise, 2006

Betacam numérique PAL, noir et blanc, son stéréo


Comme aspirés par le fond infernal d'une gravure de l'artiste et poète anglais William Blake, l'œuvre audiovisuelle Brilliant Noise nous tire vers un confin cosmique. À l'origine de cet OVNI, deux artistes anglais, Ruth Jarman et Joseph Gerhardt qui depuis 1996 se sont unis artistiquement sous le nom science-fictionnel de "Semiconductor". Collaboration à l'origine mise sur pied à des fins musicales, Semiconductor commence par créer des Sound Films où les rapports entre le son et l'image sont explorés de façon systématique. Ils abordent les relations structurelles entre musique et architecture, transforment les pistes sonores en matières visuelles et explorent l'idée de paysages abstraits en mouvement. Depuis 1999, ils travaillent à des animations numériques pour transcender les contraintes du temps, ils tentent d'explorer par ce biais le monde physique au-delà de l'expérience humaine, ainsi ils espèrent questionner notre véritable existence sur Terre. Avec Brilliant Noise les artistes nous proposent une symphonie astrale qui rejoue quelques-uns des mouvements les plus fins du soleil. Cette œuvre a été réalisée dans le cadre d'un programme de résidence initiée par le British Art Council à l'université de Berkeley en Californie, dans le département des sciences spatiales, en partenariat avec la NASA. Ils ont ainsi pu avoir accès à une multitude de photographies du soleil collectées par des satellites orbitaux. Avec l'aide des astronomes, les artistes ont examiné des giga-octets d'archives et compilé certains de ces clichés numériques pour composer une vidéo d'animation sur les oscillations du soleil. Brilliant Noise pourrait être perçue comme un documentaire mais cela serait sans compter sur la bande sonore et le montage. Par un procédé audio-informatique, les artistes ont employé les images pour commander les fluctuations du son ; selon l'intensité de la luminosité de l'image le son varie, crépite, bourdonne, vacille puis s'harmonise. La matière sonore première provient des radiations naturelles du soleil. L'interaction du son et de l'image est parfaite et permet d'élaborer une véritable fiction sonore et visuelle, chaque jaillissement de particule d'énergie revêt une couleur sonore ; un bruit de fond est quasi commun à toutes les séquences, distingué comme une interférence terrestre - ou extra terrestre - qui s'illustre par un grain neigeux. La compilation des images quant à elle, se veut "chronologique", conduite en fonction de la fréquence spectrale des documents informatiques. C'est bel et bien une histoire naturelle et universelle, qui est interprétée par les artistes, qui souhaitent nous entraîner à prendre conscience du sublime chaos de notre cosmos. Semiconductor nous livre un paysage en fusion fait de geysers de feu qui se déplacent et se consument au gré du vent astral et des audio-visions des artistes. Le spectacle qui se joue avec Brilliant Noise est extraordinaire ; cette vidéo aurait séduit les romantiques qui s'exaltaient pour les formes mystérieuses et tourmentées du paysage.


Florence Parot