La pub vidéo anthologie, 1981

Betcam SP Pal, 4/3, couleur, son


En 1981, Jean Dupuy réunit une quinzaine d’artistes autour d’un projet de vidéo collective intitulée La pub vidéo anthologie. Les premières secondes martèlent, sous la forme d’un slogan le mot « antipub », annonçant le principe même de cette bande : s’approprier les mécanismes de la publicité afin de les mettre à mal. Dans un dispositif rappelant les précédentes vidéos collectives de Jean Dupuy, les artistes sont appelés à réaliser de très courtes séquences, dont la durée respective est  proche de la longueur moyenne d’un spot télévisé. Chez certains artistes, la référence au monde publicitaire est évidente : c’est notamment le cas de Jacques Monory, qui lui empreinte sa rhétorique mielleuse - « Pour moi, un seul service, M, M, entreprise parfaite, M, satisfaction totale, M, comme idéal, vous avez besoin de M » - tout en lui opposant un violent montage d’images d’accidents de voiture. Pour d’autres artistes, c’est l’efficacité visuelle de la publicité, guidée par un impératif de séduction immédiate, qui semble nourrir l’intervention : les propositions s’orientent alors - bien plus que dans les précédentes vidéos collectives de Jean Dupuy - vers le gag absurde, le jeu de mot, ou une tendance au trucage quasi burlesque. 


Le fantôme de Marcel Duchamp se manifeste encore une fois par un goût certain pour le calembour, pratiqué ici par Patrice Lerochereuil, par Charles Dreyfus et par Jean Dupuy lui-même (« Le seizième, XVI = Sixteen, exemple : j’habite rue Michel-Ange, Paris Sixtine »). Une joyeuse irrévérence traverse cette œuvre collective, que la proposition de Robert Filliou résume peut-être au mieux : après avoir trinqué à plusieurs reprises avec un téléviseur diffusant sa propre image, celui-ci écrase une tarte à la crème sur l’écran.



Philippe Bettinelli