Kiss the girls : make them cry est une vidéo pendant laquelle s'enchainent, à un rythme rapide, des plans courts de deux types d' images. D' une part, des paroles de chanson s'inscrivent sur des fonds colorés. Ces extraits sont tirés des morceaux les plus populaires du moment, appelés aux Etats-Unis le Top 40. Le titre même de la vidéo est inspiré d'un passage de Georgy Porgy du groupe Toto. Ces paroles écrites s'accompagnent d'une voix modulée par un synthétiseur. Chaque extrait renvoie à un champ lexical précis, celui de la sentimentalité, thème des plus fédérateurs de la chanson populaire.

De cette culture populaire, Dara Brinbaum s'approprie d'autre part des extraits tirés d'une émission de la télévision américaine "Hollywood Square", qui fut popularisée en France dans les années 1980 sur TF1 sous le nom de l'"Académie des Neuf". Le programme original américain invitait des vedettes des séries télévisées pour les faire répondre à diverses questions. L'artiste isole certaines images de cette émission et leur fait subir deux types de manipulation technique : la répétition et le zoom, avant et arrière.

Dara Birnbaum focalise notre attention sur les expressions faciales des invités en fonction de leur genre, féminin ou masculin. Elle isole ces images du flux habituel proposé par la télévision pour faire apparaitre les stéréotypes véhiculés par ce médium : la femme en icône sexuelle et l'homme en être fuyant.

Elle définit cette appropriation d'images télévisuelles comme un ready-made, c'est-à-dire l'utilisation d'un objet déjà existant dans un contexte différent et artistique. Par ce processus, elle n'envisage pas de créer une nouvelle narration mais de proposer une grille de lecture différente de la culture hollywoodienne.

Ce mode de création fut à ses débuts classifié dans la piraterie artistique. Dans les années 90, un terme plus précis fut employé pour définir ce procédé : le sampling, démocratisé par le développement des outils informatiques.

Laetitia Rouiller