Sur toute la durée de la vidéo, le protocole est le même. Une quinzaine de photos défilent devant la caméra. Chacune est minutieusement décrite à voix haute par John Baldessari. N’entendant que la description, Ed Henderson doit proposer des ambiances musicales et sonores. Filmées en plan séquence avec une caméra fixe, seules les mains de Baldessari bougent à l’écran lorsqu’il manipule les images, et qu’il fait la mise au point. De la scène d’action de rodéo, au gros plan étrange d’un boa sur du béton devant une voiture à l’arrêt en passant par un couple au réveil dans une chambre au décor de magazine de mode, le choix des images est très varié, ne permettant pas de lien entre elles. Alors que le musicien Ed Henderson, qui a déjà collaboré avec l’artiste, propose 3 sons au maximum par photos, on entend la conversation entre eux et le point de vue de Baldessari sur le choix de Ed. A chaque proposition, l’artiste sous-entend qu’il y a une logique dans la relation qu’il établit entre le son et l’image. Evidemment on est dans l’arbitraire le plus total, les photos ont été choisies au hasard dans des éditions du National Geographic, et le musicien propose des ambiances à partir d’une description sommaire. L’humour se glisse dans le sérieux de la confrontation. La construction de scénarios possibles entre sons et images devient une surenchère d’arbitraires, questionnant le rapport son image. Là encore Baldessari exploite la subjectivité des interprétations d’une image et la manipulation du spectateur qui en découle.

Patricia Maincent