Magister, 1989
Bande vidéo analogique betacam SP PAL numérisée
4/3, couleur, son, français
44 min
Les dix-neuf séquences de Magister ont été conçues à la suite d’une première vidéo, Main-mise, main-levée, main-morte (1984), qui expérimentait sur un mode très théâtral différents styles oratoires d’émission culturelle de fin de soirée. Les épisodes de Magister relèvent plus clairement du pastiche télévisuel. Ils sont séparés par des « interludes », des photographies ou des plans sans aucune relation avec les contenus, comme le pratiquaient les chaînes dans les années 1970. Les décors, les cheveux mi-longs plaqués en arrière d’Éric Duyckaerts et le code vestimentaire choisi affichent une élégance parisienne faussement fantaisiste, donc romantique, et évoquent la figure d’un « intellectuel » de gauche satisfait de lui-même. Souvent sur le mode de la caricature, l’artiste déploie une pluralité de modes d’élocution et de métalangages. Il recourt à différentes disciplines – droit, mathématiques, histoire des techniques, anthropologie et littérature – pour traiter de la couleur, de la peinture à l'huile, de l’aquarelle et du ready-made, en manipulant des raisonnements absurdes et de manière délibérément pompeuse. La quasi improvisation associée au ton délibérément pompeux du discours, donnent à la pièce un ton presque potache.
Comme d’habitude, rien dans Magister n’est anodin. L’humour est réellement critique, et l’analyse esthétique apparaît là où on ne l’attend pas : « Les questions de symétrie bilatérale et de frontalité, si importantes sur le plan esthétique, sont un des fils conducteurs, que je reprendrai plus tard. » [1]
La vidéo a été tournée en une semaine, par séquences courtes écrites la veille pour le lendemain, avec une équipe de trois personnes, en partie dans des appartements prêtés pour l’occasion, en partie dans l’espace public dans des parcs. Éric Duyckaerts raconte s’être souvent interrompu à cause des nombreux fous-rires partagés avec son équipe.
Marie Muracciole
Novembre 2020
[1] Propos de l'artiste.