Vidéocartographies : Aida, Palestine, 2009

Betacam numérique PAL, noir et blanc, son


Till Roeskens, né en 1974 à Freiburg (Allemagne), vit aujourd'hui à Marseille.


Amateur de géographie appliquée, Till Roeskens appartient à la famille des artistes-explorateurs. Son travail se développe dans la rencontre avec un territoire donné et ceux qui tentent d'y tracer leurs chemins. Ce qu'il ramène de ses explorations, que ce soit sous la forme d'un livre, d'un film vidéo, d'une conférence-diaporama n'est jamais un simple rapport, mais une invitation à l'exercice du regard, un questionnement à tâtons sur ce qu'il est possible de saisir de l'infinie complexité du monde. Ses " tentatives de s'orienter " s'élaborent avec le souci constant de toucher un public non averti et de rendre les personnes rencontrées co-auteurs de l'œuvre.


Ouvert en 1948, Aïda est un camp de réfugiés palestiniens situé juste à côté de la ville de Bethléem, sur le territoire palestinien. Ses habitants viennent de plus de quarante-trois localités détruites pendant la première guerre israélo-arabe de 1948, et lors de la Guerre des Six Jours de 1967, qui opposa l'Israël à l'Egypte, la Syrie et la Jordanie. La première et deuxième intifada [1] (en 1987et 2000) bouleverseront la vie du camp.


" J'ai demandé aux habitants du camp Aïda à Bethléem d'esquisser des cartes de ce qui les entoure. Les dessins en train de se faire ont été enregistrés en vidéo, de même que les récits qui animent ces géographies subjectives. " C'est avec cette consigne que Till Roeskens a construit cette proposition. Composé de six chapitres, ce film en noir et blanc entraîne le spectateur dans les ruelles du camp Aïda. Sur la surface de l'écran, un trait noir trace les contours de maisons et les déplacements d'un résident qui, tout en dessinant, raconte sa vie dans ce lieu, ballotté par les guerres. Le contraste entre les dessins naïfs au feutre noir et la violence des histoires racontées est saisissant. Des signes simples retracent des déplacements sur le blanc de la feuille, ponctué de vies brisées par des soldats qui détruisent une ferme ou qui interdisent l'accès à des routes, empêchant tout commerce et donc toute vie. Les intervenants étant d'âges et d'horizons divers, c'est toute l'histoire de ce lieu qui est racontée avec des bribes de vie.



Patricia Maincent


[1] Signifiant soulèvement en arabe, le terme intifada est employé pour désigner deux forts mouvements d'opposition populaire contre l'armée israélienne présente dans les territoires occupés.